Après les politesses d’usage, Romain Dupuy s’assied sans empressement. Puis il relève le buste avec gravité, confiant d’une voix légèrement nasale, comme s’il était enrhumé : « Tous les jours, je pense à ces femmes dont j’ai pris la vie, à elles et à leurs familles. Je ne me reconnais pas le droit de leur demander pardon, ni même de leur présenter des excuses, je veux juste qu’on me laisse une chance de prouver que j’ai changé. » Ce patient hors norme, dont l’histoire a redéfini en France les rapports entre psychiatrie et justice, est depuis longtemps l’objet d’enjeux politiques qui le dépassent. « J’ai l’impression d’être dans un wagon lancé à pleine vitesse, que personne ne peut plus arrêter.
Romain Dupuy écarte les bras en signe d’impuissance : « À quoi servent dix-sept ans de soins intensifs s’il n’y a rien au bout, aucune perspective ? » Le personnel soignant de Cadillac redoute les conséquences d’un enfermement prolongé sans justification médicale. La cour d’appel de Bordeaux elle-même partage cette appréhension : « L’absence de décision administrative perdure depuis plusieurs années et rejaillit incontestablement sur la santé du patient », note-t-elle dans un arrêt de mai 2021.
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Romain Dupuy, interné après un double meurtre et condamné à la folie
« Nous considérons ce renvoi de balle comme un déni de justice, indique maître Hélène Lecat.
La préfète de Gironde profite de cette contradiction pour tenir une position qui nous paraît abusive.
Il s’agit à nos yeux d’une perpétuité psychiatrique qui ne dit pas son nom. »